La Commission européenne vient de publier une proposition de réforme structurante de l’union douanière visant à permettre aux douanes de l’Union européenne de répondre aux nouveaux enjeux, à l’instar du e-commerce. Cette réforme prévoit une gouvernance douanière européenne renforcée, une approche rénovée de la donnée ainsi qu’un traitement spécifique du commerce électronique.

Pourquoi une réforme de l’Union douanière ?

Une réflexion de la Commission européenne sur l’avenir de l’Union douanière engagée dès 2019

Suite au discours programmatique de la Présidente de la Commission devant le Parlement européen en 2019 invitant à faire passer l’union douanière à une étape supérieure, la Commission (DG TAXUD) a publié en septembre 2020 un plan d’action visant à affirmer le rôle majeur des douanes dans la protection des recettes de l’Union, ainsi que dans la sécurité, la santé et la prospérité des citoyens et des entreprises européens

La succession de crises depuis lors (Brexit, COVID-19, conflit en Ukraine) a souligné le rôle central des administrations douanières pour protéger le marché intérieur et les citoyens de l’Union européenne, mais aussi la nécessité de réformer l’Union douanière pour répondre à ces défis.

Les travaux du Groupe des sages

Constitué à l’initiative de la Commission en 2021, le groupe des sages a publié son rapport final le 31 mars 2022, après de multiples auditions d’administrations douanières et non douanières, tant européennes que nationales, mais aussi d’opérateurs économiques et de représentants de la société civile.

Ce rapport souligne les importantes disparités dans l’application des règles et procédures douanières, mais aussi les difficultés croissantes auxquelles font face les douanes face à la multiplication de leurs missions non douanières et l’expansion du e-commerce (fragmentation et faible qualité de la donnée, etc...). Sur la base de ce constat, ce groupe des sages a formulé 10 recommandations pour une réforme structurelle de l’Union douanière, portant ainsi au niveau politique des discussions longtemps cantonnées à des niveaux techniques.

Sous Présidence française du Conseil, un groupe de réflexion composé des directrices et directeurs généraux des douanes des Etats membres a été chargé de décliner ces recommandations en propositions concrètes dans l’objectif d’alimenter le projet de réforme présenté par la Commission européenne.

En quoi consiste le projet de réforme publié par la Commission européenne ?

Le projet de réforme publié ce 17 mai par la Commission constitue un ensemble cohérent de mesures visant à établir un partenariat renouvelé entre les douanes européennes et les entreprises en tenant compte des développements technologiques et en assurant une uniformité d’action à l’échelle européenne via la création d’une autorité douanière. 

Les principales nouveautés introduites par le projet de réforme

  • Une nouvelle approche de la donnée 

Le projet de réforme prévoit la création d’un espace de donnée européen dans lequel serait centralisée l’intégralité des données déclaratives, permettant un travail collaboratif entre la Commission, la nouvelle autorité, les autorités douanières et non douanières des Etats membres, ainsi qu’une approche rénovée de la donnée douanière autour des trois étapes de sa gestion (collecte, gestion informatique, exploitation).

Cette dernière renforcera la capacité des Etats membres à agir de manière uniforme, notamment pour répondre à un objectif de gestion du risque et de protection du marché intérieur. A terme, ce nouvel espace de données a vocation à absorber les systèmes informatiques européens et nationaux actuels. 

La réforme prévoit également de nouvelles modalités déclaratives fondée sur la transmission de données par les opérateurs ainsi que les différents acteurs de la chaîne logistique. Certains opérateurs dont la fiabilité aura été reconnue par les autorités douanières et qui garantiront un accès à leurs données en temps réel, pourront bénéficier d’un nouveau label « trust and check » leur octroyant davantage de simplifications. 

 

  • Un traitement spécifique du commerce électronique 

Afin de répondre aux enjeux du commerce électronique, le projet propose un traitement spécifique pour ces transactions, reposant sur la suppression de la franchise de 150€ pour les droits de douane à l’instar de ce qui avait été fait pour la TVA, une responsabilisation accrue des plateformes de vente ainsi qu’une intégration de manière prioritaire de ces transactions dans l’espace de données européen. La Commission propose en outre un nouveau système alternatif d’application des droits de douane pour le commerce électronique.

  • Une gouvernance douanière renforcée au niveau européen 

La Commission propose la création d’une autorité douanière européenne dotée de missions transverses de soutien aux administrations nationales allant de la gestion de la donnée au niveau européen, à la gestion de crise en matière sanitaire et de sûreté-sécurité et passant notamment par un appui en matière d’interprétation harmonisée de la réglementation. Cette autorité jouera un rôle central dans l’harmonisation de l’action douanière à l’échelle de l’UE, en collaboration avec les Etats membres. 

Un calendrier qui s’étale sur plusieurs années 

Ce projet de réforme ambitieux a vocation à entrer en vigueur de manière échelonnée sur 10 ans à partir de 2028. 

Le projet de réforme de l’Union douanière fera l’objet de discussions dans les prochains mois, notamment sous l’impulsion de la présidence du Conseil de l’UE assurée par l’Espagne à compter du 1er juillet 2023. Ces négociations permettront de définir les modalités précises de mise en œuvre. 

Plus d'information sur le projet de réforme de l'Union douanière